Le nom de domaine, à l’instar du nom commercial, est protégé par les règles qui régissent et prohibent la concurrence déloyale (cf. articles 1382 et 1383 du Code civil). Concrètement, en cas de conflit entre deux noms de domaines utilisant la même dénomination et ayant une extension différente - « .com » pour l’une, et « .fr » pour l’autre, par exemple – il s’agit pour le juge de déterminer si une partie a commis des actes fautifs, contraires aux usages loyaux du commerce, à savoir des faits de nature à créer une confusion avec le site web, les produits ou l’activité du site concurrent. Pour établir cette faute, les juges se livrent à un examen des activités respectives des sociétés et des droits antérieurs.
Examen de l’activité de la société
La question qui se pose est la suivante : les sociétés homonymes en litige sont-elles en situation de concurrence ? Pour y répondre, il paraît nécessaire de procéder à une analyse des objets sociaux respectifs des sociétés.
L’analyse porte, dans un premier temps, sur les objets sociaux déclarés au moment de la création ; il s’agit de l’objet social visé aux statuts et repris dans l’immatriculation de la société au Registre du Commerce et des Sociétés. Dans un second temps, il convient de rechercher si l’activité qui a été développée par une partie, diverge ou non, de l’objet social initialement déclaré.
Recommandation 1
Avant d’immatriculer une société, la prudence invite à procéder à une recherche d’antériorités afin de s’assurer que la dénomination envisagée n’appartient pas déjà à une société concurrente et d’éviter tout risque de confusion.
Examen des droits antérieurs
Rappelons que le droit de protection d’un nom commercial s’acquiert par le premier usage dès lors que le signe en question n’est ni générique ni descriptif.
Une jurisprudence constante applique cette solution au nom de domaine.
En revanche, les droits conférés par une dénomination sociale ou par une marque s’acquièrent respectivement dès la date d’immatriculation de la société au Registre du Commerce et des Sociétés ou dès la date de dépôt de la marque à l’INPI.
Illustration
le 1er janvier 2007, la société A réserve le nom de domaine XX.fr en vu de développer un service de courtage en assurances en ligne ;
le 4 janvier 2007, la société B dépose la marque XX en classe 36 pour désigner des services d’assurances.
Le 25 janvier 2007, la société A ouvre enfin son site Web qu’elle a fait concevoir en un temps record à son designer préféré.
Dans cette hypothèse, malgré la réservation antérieure du nom de domaine par A, c’est B qui dispose d’une antériorité (dépôt de marque le 04/01) sur le nom XX puisque A ne peut revendiquer qu’un usage effectif du nom de domaine le 25/01,.
Sauf à ce que A démontre que B a déposé la marque en fraude de ses droits, B devrait pouvoir revendiquer le monopole sur l’exploitation du nom XX.
Recommandation 2
Par conséquent, s’il est recommandé aux entreprises de réserver le plus tôt possible les noms de domaine disponibles susceptibles de les intéresser, ces dernières auront tout intérêt à déposer le nom à titre de marque et/ou à enregistrer la société nouvellement créée au Registre du Commerce et des sociétés afin d’éviter qu’un tiers ne les précède dans ses démarches.
Cette méthode est celle qui a été suivie par la Cour d’appel de Paris le 26 avril 2007 dans un litige opposant deux sociétés homonymes titulaires des noms hippocampe.fr et hippocampe.com,( CA Paris, 5ème Ch., Sect. B, 26 avril 2007; Juris-Data n° 2007-334520). En définitive, l’utilisation d’un nom de domaine n’est pas une opération sans piège. Et il est recommandé de faire appel à un professionnel pour en apprécier les risques.
Gérard Haas Haas Société d'Avocats
|